Maximiser l’accueil de la biodiversité dans les projets d’aménagement grâce à des outils de diagnostic
Lors de l’étude d’un projet, obtenir des indicateurs chiffrés relatifs à la faune et la flore peut aider à la prise en compte la biodiversité dans les choix d’aménagement. Des outils de diagnostic de l’accueil potentiel de la biodiversité selon différents scénarios permettent de maximiser et d’optimiser les lieux de refuge et d’accueil pour les espèces animales et végétales.
Quantifier le potentiel biodiversité pour lui donner plus d’importance dans les projets urbains
Dans les zones urbanisées, l’artificialisation des sols, la pollution de l’air, de l’eau et des sols, la pollution lumineuse et la fréquentation humaine fragilisent et dégradent les habitats naturels de la biodiversité.
La mesure quantifiée des enjeux ou du potentiel « biodiversité » est encore peu employée dans les projets urbains, notamment car peu d’indicateurs chiffrés permettent de mesurer les impacts des aménagements sur la biodiversité. Des outils de diagnostic permettent de répondre à ce besoin et d’orienter les maîtrises d’œuvre vers des aménagements plus vertueux face à l’effondrement de la biodiversité en milieu urbain.
Points forts
Une meilleure prise en compte de la biodiversité dans les projets d’aménagement
Des données chiffrées pour mettre en avant les enjeux de biodiversité, souvent moins mis en avant que l’enjeu carbone, qui est lui plus facilement chiffrable
Des recommandations d’actions pour améliorer l’accueil de la biodiversité
Il existe plusieurs outils et méthodes pour diagnostiquer la biodiversité sur un territoire et identifier les actions à mettre en place pour l'améliorer. Ils permettent aux acteurs de l’aménagement de s’approprier les enjeux de biodiversité sur leurs projets et constituent souvent des outils d’aide à la décision. Retrouvez en une liste non exhaustive dans la rubrique prestataires à la fin de cette fiche.
Focus sur Biodi(V)strict®, un outil opérationnel qui inclut une analyse quantitative et qualitative
Biodi(V)strict® est un outil de diagnostic et d’aide à la décision créé par l’entreprise Urbalia pour quantifier et améliorer le « potentiel biodiversité » des projets d'aménagement. Biodi(V)strict se décline en un logiciel informatique, développé par AgroParisTech, alimenté par des cartographies SIG (Systèmes d’Informations Géographiques), via QGIS. Employé par des écologues formés à son utilisation, il permet d'orienter les décideurs, aménageurs, promoteurs et bailleurs sociaux vers des projets plus vertueux pour la biodiversité.
Un outil qui permet d’orienter les décisions d’aménagement en phase projet
En phase de conception et d’études, l’utilisation de l’outil Biodi(V)strict permet de fournir des données quantitatives qui amènent la maîtrise d’œuvre à se questionner sur les enjeux de biodiversité. Les chiffres fournis servent en effet de base à la discussion entre les écologues qui mènent l’étude et les paysagistes et architectes, pour orienter les choix d’aménagement afin d’améliorer le score obtenu.
L’outil peut être utilisé pour le neuf ou pour des projets d’aménagement dans l’existant intégrant des modifications importantes du territoire. Il peut également servir à anticiper le retoquage d’un projet par les institutions si celui-ci a un impact trop négatif sur la biodiversité.
Comparer le potentiel biodiversité de différents scénarios d’aménagement
Biodi(V)strict permet d’évaluer le potentiel biodiversité d’un projet, par comparaison au site initial et/ou à d’autres scénarios d’aménagement, par le calcul de cinq indicateurs. Cette méthode met en évidence les impacts d’un projet sur les écosystèmes et la marge d’amélioration possible.
Les valeurs de ces indicateurs et leur confrontation avant/après permet d’identifier les principales pressions pesant sur le site en matière de biodiversité mais aussi ses atouts. Cela facilite l’identification des leviers d’action à engager et souligne les opportunités offertes par l’intégration des écosystèmes dans les projets de construction.
Chaque indicateur renvoie à un enjeu écologique fort en milieu urbain. Ainsi sont calculés :
Un indicateur de perméabilité à l’eau qui renseigne sur la capacité du terrain à infiltrer les eaux pluviales. Cet indicateur incite l’aménageur à minimiser l’artificialisation des sols pour préserver leurs fonctions : stockage et épuration de l’eau, support pour la flore, participation au cycle du carbone, …
Un indicateur de proportion d’espaces végétalisés qui permet d’évaluer la perte ou l’augmentation du couvert végétal dû au projet et d’appréhender l’enjeu de la réintroduction du végétal en ville. Cet indicateur amène les décisionnaires à envisager la conservation d’espaces verts déjà présents sur le site et la création de nouveaux.
Un indicateur de diversité des habitats qui introduit, à l’échelle d’un projet de construction, l’enjeu de la diversification des espaces verts en ville. Une diversité des habitats (boisements, mares, haies, etc.) disponibles favorise une plus grande diversité d’espèces en offrant une plus grande variété des sites de reproduction, d’alimentation et de refuge.
Un indicateur de diversité des strates végétales qui permet de tenir compte de l’étagement vertical de la végétation, et de son lien avec le « potentiel biodiversité » d’un habitat. Plus l’étagement vertical de la végétation est diversifié, plus il y a de micro-habitats disponibles pour les espèces.
Un indicateur de connectivité qui introduit la notion de fonctionnalité des différents éléments d’un milieu. La mise en place de corridors au sein des villes permet de réduire l’isolement des espaces verts et de favoriser la biodiversité.
L’approche est centrée sur la notion d’habitat et du potentiel d’accueil pour la biodiversité locale : 144 habitats sont référencés dans la base de données, et chacun correspond à un coefficient de pondération reflétant son potentiel d’accueil pour la biodiversité.
Les modes de gestion sont également pris en compte dans le calcul du score, puisque tous les habitats végétalisés sont déclinés par deux selon la gestion choisie par le maître d’œuvre (fauche annuelle ou bisannuelle, taille intensive ou taille douce, …).
Un accompagnement et des préconisations par des écologues formés au logiciel
La conduite d’une étude utilisant Biodi(V)strict ne se base pas uniquement sur les scores chiffrés donnés par le logiciel. Elle est menée par des écologues formés à l’outil, dont les compétences et connaissances vont permettre d’expliquer les résultats et de proposer des préconisations adaptées. En fonction des besoins et possibilités du projet, les écologues vont formuler des propositions pour intégrer la biodiversité dans les choix paysagers. Par exemple :
Ajouter une ligne arbustive sur un alignement d’arbres pour avoir une haie multistrate,
Guider les eaux pluviales vers un milieux humide,
Végétaliser une toiture,
Faire évoluer des pelouses en prairies
Connecter un alignement d’arbres avec un autre milieu écologique,…
Cinq grandes étapes
Le « diagnostic du site initial » : il consiste à identifier les habitats présents sur le site avant et après projet, à partir de photographies aériennes, et d’une visite du site initial. Des compétences en écologie urbaine sont nécessaires pour l’identification des habitats écologiques et des strates végétales.
L’analyse du projet d’aménagement passe par une étude des pièces techniques (notice paysagère, palettes végétales) et du plan masse du projet. Des échanges complémentaires avec la MOE paysagiste peuvent permettre de préciser la cartographie.
La cartographie des habitats présents, pour le site initial (avant la réalisation de l’aménagement) et pour l’état projeté ou les différents scénarios d’aménagement. Celles-ci sont réalisées sur le logiciel gratuit QGIS.
La mesure des cinq indicateurs avec Biodi(V)strict : valeur comprise entre 0 et 1. Les résultats Biodi(V)strict® sont générés sous forme de diagramme « radar », d’illustrations cartographiées des résultats et de données générales sur la proportion surfacique des habitats.
La présentation des résultats et les préconisations : cette étape consiste à identifier des pressions et/ou opportunités que le projet va impliquer sur le site à partir des résultats de l’outil et la proposition d’aménagement favorables à la biodiversité.
L’utilisation de Biodi(V)strict® dans le cadre du label Biodivercity ready
En mars 2024, nous avons échangé avec Marine Trémège, Responsable du Pôle Biodiversité chez Etamine. Le bureau d’études est co-constructeur du label Biodivercity ready, qui évalue et promeut les opérations d’aménagement de quartier qui prennent en compte et valorisent la biodiversité au bénéfice des résidents.
Biodivercity est un label porté par le Conseil International Biodiversité & Immobilier (CIBI), avec pour but de faire grandir la place donnée à la biodiversité dans la construction et les métiers de l’immobilier. Il est décliné en trois labels, dont Biodivercity ready, qui concerne les projets à l’échelle du quartier. Le label est organisé en quatre axes, dont le troisième est dédié à l’évaluation des bénéfices écologiques et utilise Biodi(V)strict comme référentiel. L’outil permet notamment d’obtenir un visuel avant/après du projet grâce à la représentation cartographique des habitats.
Pour ce label, Urbalia a formé des écologues à l’utilisation de l'outil afin qu’ils puissent le prendre en main en tant que « Biodivercity assesseur » et réaliser les diagnostics biodiversité des projets. En fonction de la différence affichée par le radar Biodi(V)strict entre le site initial et le projet, l’opération va obtenir une note allant de A à E sur l’axe 3 du label.
Retours utilisateurs-rices
La labellisation du projet Parc en scène
Le projet urbain Parc en scène, mené par le promoteur Linkcity sur les communes d’Orly et de Thiais, fait l’objet d’une labellisation Biodivercity ready. L’opération prend place sur une friche industrielle très artificialisée, et obtient donc un meilleur score avant/après concernant le potentiel d’accueil de la biodiversité calculé par Biodi(V)strict, ce qui lui donne une note de A pour l’axe 3 du label. Elle inclut en effet notamment la création d’espaces verts.
D’autres projets sont en cours d’évaluation par les assesseurs, mais leur implantation sur des zones originellement non artificialisées ne leur permettront pas d’améliorer le score avant/après opération, puisque le potentiel d’accueil de biodiversité va nécessairement diminuer avec l’artificialisation du sol.
Co-bénéfices
Co-bénéfices environnementaux :
Rafraîchissement urbain
Gestion des eaux pluviales
Accès à la nature en ville
Sensibilisation aux enjeux de biodiversité
Co-bénéfices autres :
Données utiles pour communiquer autour d’un projet
Coûts
Combien coûte une étude utilisant Biodi(V)strict®?
La conduite d’une étude utilisant Biodi(V)strict® peut démarrer à partir de 2 500 €HT, en incluant également l’accompagnement réalisé par les écologues (analyse amont, visite de site, cartographie des habitats, préconisations, …). Le prix va ensuite dépendre de la surface, des caractéristiques du projet et de l’étendu de l’accompagnement.
Complexité et contexte de mise en oeuvre
Les conditions nécessaires pour utiliser Biodi(V)strict®
Biodi(V)strict est applicable aux projets urbains ou péri-urbains engendrant des modifications profondes d’un site et intégrant des aménagements paysagers. L’utilisation de l’outil n’est pas optimale dans les cas suivants :
1. Un site très petit (< 300m²)
2. Un site initial et un projet intégrant très peu d’espaces végétalisés
3. Un site en milieu naturel
L’outil s’utilisant à l’étape projet, il peut parfois être complexe de renseigner tous les choix d’aménagements prévus. Le plan masse à intégrer dans QGIS pour obtenir les cartographies doit en effet être très précis, pour identifier les différents espaces naturels prévus, alors que l’équipe projet n’en est pas encore forcément à ce niveau de détail sur le choix des aménagements paysagers.
Il existe quelques outils de diagnostic de la biodiversité, proposé par des acteurs privés ou résultant de démarches publiques.
Biodi(V)strict®
Urbalia
Urbalia est une start up spécialisée dans le conseil en biodiversité et agriculture urbaine. Ils peuvent accompagner les acteurs de l’aménagement et de la construction pour faciliter l’intégration de la biodiversité dans les projets de rénovation ou de construction.
Resilience For Real Estate (R4RE) - Volet BIODI-Bat
Observatoire de l'Immobilier Durable
R4RE est un outil opensource d’analyse de la résilience du secteur immobilier. Son volet BIODI-Bat permet d’obtenir des indicateurs sur l’état de la biodiversité sur un territoire et sur le potentiel d'accueil de biodiversité que peut avoir un bâtiment et comment l’améliorer.
Le GBS permet aux entreprises et institutions financières de mesurer leur impact sur la biodiversité et d’intégrer cette information dans leur politique de pilotage opérationnel et leur stratégie décisionnelle.
Atlas de la biodiversité communale ou intercommunale (ABC)
Office français de la biodiversité (OFB)
Un Atlas de la biodiversité communale ou intercommunale est un inventaire des milieux et espèces présents sur un territoire. L’Office français de la biodiversité peut financer et accompagner les collectivités qui souhaitent réaliser le leur.
Cet indicateur décrit la proportion des surfaces propices à la biodiversité (surface éco-aménageable) par rapport à la surface totale d'une parcelle. Il est possible d’exiger l'atteinte d'un CBS spécifique dans un document d'urbanisme ou dans un projet d'aménagement urbain.
