Rafraîchir l'espace urbain avec des miroirs d'eau brumisants

Depuis huit ans, le jardin Nelson Mandela dans le forum des Halles de Châtelet à Paris accueille quatre miroirs d’eau brumisant. Aménagement qui séduit de plus en plus de villes en France, les miroirs d’eau apportent une réponse esthétique à la question du rafraîchissement des espaces urbains et de leurs usagers.


Enjeux d'adaptation

Créer des îlots de fraîcheur


Face à la montée en fréquence et en intensité des fortes chaleurs, le milieu urbain doit se recomposer pour être moins minéral et renforcer la présence de l’eau en son sein. Les miroirs d’eau accompagnés de brumisation offrent aux usagers un point de fraîcheur en période estivale, disponible dans l’espace public. 
Points forts
  • Effet rafraîchissant
  • Ludique
  • Création de lieu de vie
  • Magnifie le patrimoine (reflets)
Miroir d'eau brumisant à Paris (orienté Canopée) © APC
Miroir d'eau brumisant à Paris (orienté St Eustache) © APC
Description de la solution
Domaine d'application : espace public

Des miroirs d’eau pour rafraîchir l’espace public

Qu’est-ce qu’un miroir d’eau brumisant ?


Les miroirs d’eau sont des fontaines aménagées dans l’espace public dont la caractéristique est qu’elles sont horizontales. Des dalles de pierre (souvent sombres) sont recouvertes d’une fine couche d’eau de quelques centimètres d’épaisseur, créant ainsi une surface lisse où l’usager peut marcher pour se rafraîchir.

Ces fontaines sont appelées « miroirs » car elles vont pouvoir refléter les bâtiments (ou autres éléments alentours) sur leur surface. C’est pourquoi ces dispositifs sont aussi installés pour leur esthétisme et s’intègrent bien dans des lieux où se situent des bâtiments patrimoniaux.

Pour créer un îlot de fraîcheur, les miroirs d’eau peuvent être agrémentés de brumisation ascendante. En effet, l’eau du miroir peut abriter des buses pour pulvériser la brume par le bas. Pour pouvoir fonctionner, les buses doivent être à découvert.

Ces fontaines fonctionnent donc par cycles successifs. Un premier cycle rempli le miroir pour créer la pellicule d’eau. Puis la fontaine va se vider pour laisser place à une phase de brumisation.


La question de l’eau : qualité, consommation, gestion


Les miroirs d’eau ont vocation à accueillir du public en leur sein. Que ce soit par le plateau d’eau où l’on peut marcher, ou le temps de brumisation qui va envelopper l’usager d’un nuage rafraîchissant, ce type d’aménagement amène les individus à être en contact avec l’eau utilisée. Par conséquent, il est nécessaire d’utiliser de l’eau potable, soumise à des contrôles de qualité réguliers.

De plus, la pandémie de COVID-19 a amené les pouvoirs publics à réguler la présence de la brumisation ascendante dans l’espace public. En effet, selon le Haut Conseil pour la Santé Public, ces brumisateurs, dits de type 3, créent des flux d’air ascendants qui peuvent disperser des émissions humaines, de virus ou de bactéries par exemple. C’est pourquoi la brumisation ascendante a été interdite pendant 2 ans au moment de la crise sanitaire.

En terme de consommation, les miroirs d’eau ne sont pas spécialement économes en eau. Bien que l’eau utilisée puisse être en circuit fermé (stockée dans des bassins sous la fontaine), les pertes proviennent de la forme de l’aménagement. Puisqu’ils consistent en de larges plateaux d’eau, on observe un fort effet d’évaporation sur les miroirs, qui n’est pas négligeable. Plus le plateau d’eau est large, plus le miroir va consommer. A cela s’ajoutent les pertes liées à la brumisation.


Fonctionnement, équipement et entretien


Les miroirs d’eau avec brumisation sont des installations assez complexes qui nécessitent beaucoup d’équipement. Pompes, buses, bassins, sondes et capteurs, systèmes automatisés régulant les différents cycles du miroir, en tout, ce sont plusieurs dizaines d’équipements qui peuvent être mis en place pour le bon fonctionnement de la fontaine. Toutes les composantes doivent bien entendu être régulièrement entretenues.

De plus, il faut aussi assurer la qualité de l’eau en permanence, ce qui mobilise personnel et matériel.

En revanche, les miroirs d’eau brumisant n’ont vocation à ne fonctionner que l’été (comme la plupart des fontaines) puisque l’objectif est de rafraîchir l’espace public. 

Expérimentation de la solution

Quatre miroirs d’eau brumisant à Paris

Pendant près d’une décennie, le jardin Nelson Mandela à Châtelet-le-Halles à Paris a subi une transformation complète. Dans la restructuration de la zone, PariSeine.sem a initié la construction de quatre miroirs d’eau proches de la Canopée des Halles, en tant que maître d’ouvrage. La maîtrise d’œuvre a été assurée par l’aménageur Terideal.

Caractéristiques techniques


Deux chambres de fontainerie sont nécessaires pour assurer le fonctionnement des quatre miroirs d’eau. Elles sont placées sous l’aménagement. Un caniveau est placé tout autour de chaque miroir pour récupérer l’eau débordant. Elle est ramenée dans les bâches de stockage placées dans les chambres de fontainerie pour être réutilisée. Dans ces bâches sont placées des sondes piézométriques pour savoir s’il y a besoin d’un apport en eau.

De plus, le plateau d’eau des miroirs est limité à 2 cm et l’eau utilisée provient du réseau d’eau potable. Parce que l’eau de Paris est légèrement dure (riche en calcaire), les équipements comptent un adoucisseur d’eau pour éviter les dépôts de calcaire sur la peau lors de la brumisation des usagers.

Les quatre miroirs d’eau sont agrémentés de brumisation ascendante et l’alternance entre les deux se fait selon des cycles de 140 secondes.

En cas de dysfonctionnement, un signal est automatiquement envoyé aux services des espaces verts de la Ville (Direction des Espaces Verts et de l’Environnement – DEVE)

Automatisation et conditions de fonctionnement


Le fonctionnement des installations est entièrement automatisé. Par exemple, la brumisation n’entrera pas en marche en cas de pluie, de vent, ou de températures trop basses (nul besoin de rafraîchir l’espace s’il ne fait pas déjà chaud).

Ainsi, une station météorologique a été installée au niveau des miroirs d’eau. Elle est composée :

- D’un anémomètre : la brumisation s’arrête si le vent est supérieur à 15km/h
- D’une sonde pluviométrique : la brumisation s’arrête s’il pleut
- D’un thermomètre : la brumisation s’arrête s’il fait moins de 10 degrés

La fontaine se met en hivernage en octobre.

Une vigilance accrue


L’ensemble des équipements nécessite des visites hebdomadaires, voire bihebdomadaires (pour les pompes notamment), mensuels, trimestrielles et annuelles.

La technicité de l’aménagement fait que les miroirs d’eau de Châtelet entrent dans la catégorie des fontaines parisiennes dites « complexes », en opposition aux fontaines « simples ».

Cette information a son importance car elle va influer sur le régime de facturation de l’entretien apporté. 


Gouvernance et entretien


A Paris, la direction des espaces verts ne gère l’exploitation d’aucune fontaine. La Ville a fait appel à un marché à bons de commande tel que défini par l’article 77 du Code des marchés publics. Les marchés à bons de commande « permettent aux acheteurs publics d’effectuer des achats à caractère répétitif auprès d’un ou plusieurs opérateurs économiques sélectionnés à la suite d’une seule procédure de publicité et de mise en concurrence. »
Ainsi, depuis 13 ans, c’est VEOLIA qui s’occupe de cette exploitation et, par conséquent, de l’entretien des fontaines.

Or, la facturation opérée par l’entreprise à la Ville pour l’entretien de ses fontaines variera en fonction de la catégorie de cette dernière.

L’entretien d’une fontaine simple est facturé au passage uniquement. Celui d’une fontaine complexe est bien facturé au passage, mais également au nombre de jour de fonctionnement de chaque équipement. Ainsi, sur les miroirs d’eau de Châtelet, 20 équipements sont répertoriés, et chaque jour de fonctionnement de chacun de ces équipements est pris en compte dans la facturation de l’entretien.

Les miroirs d’eau sont l’une des fontaines les plus rentables de VEOLIA à Paris.

Période de fonctionnement


Pour cette raison, il est en réalité très cher de faire fonctionner ces fontaines et la Ville a donc réduit leur période d’activité à la stricte saison estivale, de juin à septembre. Pour en savoir plus sur les coûts, se référer à la rubrique « Coûts » de cette fiche. 
Retours utilisateurs-rices

Retour d’expérience de P. Le Tourain, agent de la Direction des Espaces Verts et de l’Environnement (DEVE) de Paris, sur les quatre miroirs d’eau de Châtelet

Selon Pascale Le Tourain, la capacité des miroirs d’eau brumisant à rafraîchir l’espace public est relativement limitée. Avec une brumisation ascendante qui ne monte pas très haut, ce sont surtout les enfants qui profitent de cet espace. Aux vues des sommes très élevées qui sont reversées à VEOLIA pour l’entretien des fontaines, il est peu probable que beaucoup d’autres miroirs d’eau ne soient installés dans la capitale. 

Co-bénéfices

Co-bénéfices environnementaux :

  • Biodiversité

Co-bénéfices autres :

  • Création de lieux de rencontre des usagers
Coûts

L’exemple de Paris : des coûts d’exploitation élevés

Il est difficile d’évaluer le coût de création des miroirs d’eau de Châtelet-les-Halles puisqu’ils l’ont été lors de la restructuration des jardins Nelson Mandela et qu’ils ne sont pas le seul aménagement qui a vu le jour dans cette opération.

En revanche, il est possible d’évaluer le coût de fonctionnement et d’entretien des miroirs brumisant. En effet, la période de fonctionnement d’une fontaine « classique » s’étend d’avril à octobre avec un entretien facturé au passage.

Or, puisque les miroirs d’eau sont définis comme étant une fontaine complexe, la facturation prend aussi en compte le nombre de jours de fonctionnement de chaque équipement. Par conséquent, s’ils entraient en fonctionnement d’avril à octobre, ces miroirs coûteraient 90 000 euros à l’année que la Ville paierait à VEOLIA pour l’entretien seulement.

C’est pourquoi les miroirs d’eau de Châtelet ne fonctionnent que de juin à septembre.

Ainsi, chaque chambre de fontainerie coûte 23 000 et 24 000 euros par an à la Ville de Paris. 

Complexité et contexte de mise en oeuvre

Des travaux conséquents


La nature des miroirs d’eau brumisant nécessite d’apporter une quantité conséquente d’équipements qu’il faut ensuite intégrer au site, notamment sous les miroirs. Il est donc peut être plus pertinent de penser la création de telles fontaines dans des projets d’aménagement plus globaux pour limiter les coûts liés aux miroirs eux-mêmes. Dans le cas des miroirs d’eau du jardin N. Mandela aux Halles de Châtelet, la création des quatre miroirs d’eau s’est faite dans le cadre d’une refonte complète du quartier.

Besoin de technologie


Pour que la brumisation soit pertinente, c’est-à-dire qu’elle remplisse pleinement sa fonction de rafraîchissement de l’usager, elle doit être installée et entrer en fonctionnement dans un cadre propice. Ainsi, il vaut mieux éviter les endroits venteux car les miroirs d’eau brumisant perdront tout impact sur la température locale.
De plus, puisque la brumisation ne peut fonctionner que dans des conditions météorologiques bien particulières (vent, pluie, température), il faut pouvoir mesurer ces conditions, et agir en conséquence. Cela nécessite d’installer des instruments de mesure tels que décrits dans la rubrique « Expérimentation » ainsi que des technologies pouvant contrôler le fonctionnement des buses de brumisation. 

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